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Entretien

Ghislain de Marsily : Une ressource indispensable

Ghislain de Marsily : Une ressource indispensable
©D.R.
À l’heure où sa répartition est de plus en plus inégale à la surface du Globe, la bonne gestion de l’eau se révèle cruciale pour permettre d’assurer la survie des hommes. Hydrologue, membre de l’Académie des Sciences, Ghislain de Marsily explique quels sont les enjeux liés à l'eau, et quelles incidences notre comportement peuvent avoir.

L’École aujourd’hui : Quels sont les enjeux liés à l’eau à l’échelle de la Planète ?
Ghislain de Marsily : 95 % de l’eau dont nous avons besoin sert à produire la nourriture que nous consommons, si l’on compte tant l’eau d’irrigation que l’eau de pluie de l’agriculture dite pluviale. Nous sommes actuellement 7 milliards d’habitants sur Terre, et dépasserons très probablement les 9 milliards d’ici un peu moins de 40 ans. Il va falloir subvenir aux besoins en eau et en nourriture de deux milliards de personnes supplémentaires, et faire face aux changements des habitudes alimentaires de beaucoup d’entre nous (augmentation de la consommation de viande…). La problématique de l’eau est donc indissociable de celle de l’alimentation. Or, si la quantité d’eau à la surface du Globe est stable, et globalement suffisante, elle est en revanche très inégalement répartie. Et les changements climatiques anticipés vont probablement accentuer ce déséquilibre. En étant très simplificateur, je dirais que la ceinture désertique de l’Hémisphère Nord (la latitude du Sahara) va se déplacer vers le Pôle Nord, et celle de l’Hémisphère Sud vers le Pôle Sud. On peut penser que du Nord du Sahara jusqu’à l’Europe du Sud, le climat sera plus sec, avec des précipitations estivales moins importantes. Le manque d’eau et la surface insuffisante de sols cultivables contraignent d’ores et déjà certains pays du Maghreb et du Moyen-Orient à se procurer 30 % de leur alimentation grâce à l’importation. Un chiffre qui atteindra certainement 50 % en 2050.

La pollution occasionnée par les activités humaines pourrait-elle remettre en cause cette disponibilité ?
G. de M. : La qualité des eaux dans les rivières était exécrable au xixe siècle. C’est pour cela que Paris est allé puiser son eau jusqu’à 150 kilomètres, par les grands aqueducs. Les rejets domestiques et industriels ont aggravé la situation jusqu’à ce que la loi sur l’eau de 1964 en France impose des solutions efficaces : installation de stations d’épuration, interdiction de rejeter des polluants dans les cours d’eaux, traitement des eaux dans les usines, augmentation du débit dans les rivières par la construction de barrages afin de limiter la concentration de polluants, etc. En revanche, depuis les années 1960, l’excès de nitrates et de pesticides dans l’agriculture a engendré la pollution croissante des eaux souterraines. Or, la moitié des captages d’eau potable sont alimentés par des puits situés dans ces nappes. Le problème est difficile à résoudre dans la mesure où traiter cette eau polluée revient très cher et, si l’on choisit de réduire les produits phytosanitaires utilisés et les engrais, la production agricole diminue…...

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