"Ils ont tué des gens qui faisaient des dessins rigolos pour dire des choses dures"
Ce triste jeudi du 8 janvier, avant le début des cours à 8h30, l'équipe enseignante de mon école a décidé de parler de ce terrible événement aux élèves. Nous sommes restés simples dans nos explications, et surtout rassurants au maximum. On s'est dit qu'il fallait également attendre que les élèves posent eux-mêmes des questions ou abordent le sujet. Il fallait donc prendre sur soi, car comme beaucoup, nous aussi, nous étions sous le choc. On était triste et en colère en même temps. Il fallait donc trouver des mots et rassurer… Depuis la veille, en pensant à mes élèves de CE2, j'avais collecté certains documents comme, l'article 19 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen [1], ou encore un passage de Rousseau Du contrat social. [2]
Je ne voulais parler ni de religion, ni montrer des caricatures, car tout ceci dépasse largement la compréhension de mes élèves. Il fallait que j'explique qu'il s'agit d'un événement grave et en quoi il était grave.
Une fois en classe, les élèves posaient de nombreuses questions et parlaient des images vues à la télévision. Certains élèves n'étaient pas au courant de l'événement, d'autres étaient surtout choqués par la réaction de leurs mamans qui pleuraient. Une petite fille nous a confié avoir dit à sa maman : "Pourquoi tu continues à regarder la télé si cela te fait pleurer ?". Nous avons pris le temps d’en discuter. Ils sont habitués à ces petits moments de discussion, car dès qu'un événement (personnel ou non) les perturbe, on prend le temps d'en parler, de clarifier ce qui reste flou, de rectifier ce qui est erroné. Mes élèves avaient donc plusieurs questions et derrière ces questions se cachaient des inquiétudes.
La première de ces questions concernait le fait que des policiers aient été tués. En effet, pour mes CE2, le fait qu'on puisse tuer des policiers, alors qu'ils sont là pour assurer notre sécurité, causait une grande angoisse. Du coup, tout devenait possible, comme par exemple, attaquer des écoles. Cette inquiétude était renforcée par l’annonce des médias la veille précisant que les deux criminels venaient de Reims, tout proche de notre école. Il fallait donc les rassurer et dire que la police est toujours là pour nous protéger et que depuis cet événement, les mesures sont renforcées. Mais j'ai également ajouté que par moment malheureusement des policiers se font tuer.
Une petite fille a alors posé une autre question (et celle-là était inévitable) : pourquoi avoir tué tous ces gens ? J'ai d'abord souligné qu'on n'a pas le droit de tuer qui que ce soit dans notre pays. Il fallait alors aborder une notio...