Etayer pour désétayer
L’enseignant travaille quotidiennement avec l’hétérogénéité des élèves. Celle-ci rend complexe son activité, notamment en CE1 lorsque les élèves en sont à des niveaux différents d’apprentissage de la lecture et que l’accès au sens d’un texte est empêché par un certains nombres d’obstacles allant du décodage des sons complexes à la méconnaissance du lexique, aux malentendus contenus dans les concepts qui s’y rattachent. Comme aimait à le constater Burns en 1972 :
- "Il n’y a pas deux élèves qui progressent à la même vitesse
- Il n’y a pas deux élèves qui soient prêts à apprendre en même temps
- Il n’y a pas deux élèves qui utilisent les mêmes techniques d’étude
- Il n’y a pas deux élèves qui résolvent les problèmes de la même manière
- Il n’y a pas deux élèves qui possèdent le même répertoire de comportements
- Il n’y a pas deux élèves qui possèdent le même profil d’intérêt
- Il n’y a pas deux élèves qui soient motivés pour atteindre les mêmes buts."
La différenciation pédagogique
Dès lors, l’enseignant est confronté à l’acquisition d’un nouveau geste professionnel lié à la prise en compte de cette diversité : la différenciation pédagogique. L’hétérogénéité des situations impose à l’enseignant une approche systémique. Il va analyser, diagnostiquer par l’observation, l’écoute, l’évaluation, la métacognition, la nature des obstacles rencontrés par l’élève pour l’aider à accéder à l’apprentissage. Les causes sont parfois endogènes, exogènes (situation sociale, relation école-famille, climat scolaire…), ou multifactorielles, rendant la tâche difficile à l’enseignant dans l’analyse des difficultés rencontrées. Une fois la cause identifiée, l’enseignant choisit alors une aide pour y remédier. Roland Goigoux distingue sept familles : exercer, réviser, soutenir, préparer, revenir en arrière, compenser, faire autrement.
L’étayage appartient à une de ces sept familles : le soutien. Cette modalité mise en avant par Jérôme Bruner est nommée "Scaffolding", littéralement "échafaudage", traduit ensuite en français par étayage, supprimant la dimension architecturale et complexe du réseau géométrique de soutien à l’élévation. Le mot étayage renvoie à une dimension psychologique, voire psychanalytique. Jérôme Bruner a lui-même "échafaudé" sa réflexion sémantique à partir du Anlehnung de Freud (imiter quelqu’un, anlehnen : appuyer sur, poser sur,…). L’enseignant échafaude ainsi des hypothèses de soutien multiples pour mettre en place un étayage.
Bruner évoque ainsi l’étayage : "Ce système de support, fourni par l’adulte à travers le discours ou la communication plus généralement, est un peu comme un étayage, à travers lequel l’adulte restreint la complexité de la tâche per...