Rentrée 2022 : paroles d’enseignants
Les réseaux sociaux constituent de redoutables scanners des multiples facettes du métier d’enseignant. Les différentes manifestations des #stylos rouges et #pasdevague, lancées en 2019 en dehors des syndicats n’ont pas connu de mouvement organisé par la suite. Mais les protestations ont migré en ligne. Très populaire sur Twitter où il est suivi par 450 000 personnes, Monsieur Le Prof raconte depuis des années son quotidien d’enseignant d’anglais par petits traits d’humour. Fin août, il a annoncé que la rentrée 2022 sera sa dernière et qu’il partirait avant juin 2023, avec tristesse mais sans regret. Après dix ans d’enseignement, il livre sur le réseau à l’oiseau bleu son blues. Manque de sens, perte de valeur "d’un beau métier", problèmes d’argent ; à 34 ans, il touche 1850 euros nets, soit 200 euros de plus que lorsqu’il a commencé voici dix ans. Lui manquera le rapport aux élèves, leur vision du monde et ses collègues.
Autre figure de Twitter et auteur de Un instit ne devrait pas avoir à dire ça et Qui va sauver l’école ?, Sylvain Grandserre s’est mis en disponibilité depuis un an. Après 28 ans dans l’Éducation nationale, dont vingt ans comme chargé d’accueil des stagiaires, il a remarqué de profondes évolutions dans le travail de ses jeunes collègues. "J’ai été beaucoup impressionné au fil du temps par le niveau de charge de travail des stagiaires, commente-t-il. Avec la mastérisation, ils sont débordés, entre le suivi des cours et le stage d’observation. L’informatique a joué un grand rôle et ils sont énormément sollicités à distance."
Choc des cultures
Chloé* est en deuxième année de Master MEEF (Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation) à Rennes. En parallèle, elle est contractuelle à tiers temps et prépare son concours qui aura lieu en avril 2023. "J’accompagne une classe de CP tous les mardis et un lundi sur trois, raconte-t-elle. Par rapport aux contractuels embauchés pour la rentrée, j’ai un soutien sur le terrain car la directrice de l’école est ma tutrice de terrain." Elle a eu un échange avec l’enseignante de CP et elles se sont réparti les matières. "Je travaille l’anglais davantage qu’elle, je ferai les grandeurs et mesures en mathématiques par exemple, et j’ai construit ma progression et ma programmation." Contrairement à bon nombre de camarades de Master 2 MEEF qui ont choisi d’être en stage, elle apprécie le fait d’enseigner après plusieurs stages réalisés en Master 1.
Autre observation de Sylvain Grandserre, l’éloignement entre les jeunes adultes désirant travailler dans l’enseignement et les enfants. "Les stagiaires que j’ai encadrés sont très dévoués mais ont rarement rencontré d’enfants avant de rencontrer des élèves. Ils sont entrés par les connaissances et les sciences humaines...