3 questions à...Odile Espinoza
L’École aujourd’hui : Comment les jeunes enfants construisent-ils la notion de temps ?
L’enfant distingue très tôt le passé, le présent et le futur, mais à 3-4 ans il n’a encore qu’une connaissance très parcellaire des divisions conventionnelles du temps. C’est entre 5 et 8 ans que les enfants apprennent peu à peu à situer les événements sur une échelle unifiée du temps. Mais comprendre le temps, c’est aussi comprendre pourquoi les événements se succèdent dans l’ordre où ils le font. Entre 3 et 5 ans, les enfants commencent à interpréter les relations de succession en termes de causalité, et deviennent capables d’identifier la cause d’un événement en comparant un état final à un état initial. Avant cet âge, ils s’appuient sur leur connaissance des effets habituels des différentes causes possibles sans prendre en compte le déroulement temporel de la situation. Par exemple, si on leur présente l’image d’une tasse cassée et l’image de cette même tasse cassée et mouillée, ils attribueront la transformation à un marteau, sans différencier cette situation de celle où l’état initial est une tasse mouillée et l’état final une tasse mouillée et cassée. En général, les enfants de 4-5 ans ne font plus cette erreur.
Comment l’école maternelle peut-elle aider les enfants à comprendre les successions causales ?
À l’école maternelle, une activité fréquemment proposée aux élèves est d’ordonner une séquence d’images représentant les différentes scènes d’une histoire. Ce qui est intéressant dans cette activité, c’est la reconstruction d’un ordre logique et non la mémorisation d’une séquence arbitraire d’événements. C’est pourquoi il est beaucoup plus important de s’assurer que les enfants comprennent pourquoi la petite poule rousse a refusé de partager son pain avec ses amis que de vérifier qu’ils ont mémorisé l’ordre dans lequel elle les avait rencontrés. Dans la vie réelle, les événements sont un mélange complexe d’activités reliées logiquement (se laver les dents après avoir déjeuné) et d’activités dont l’ordre est arbitraire (se doucher et déjeuner) et donc modifiable. Il est intéressant de faire réfléchir les enfants sur la distinction entre les deux types de séquences.
Quelles difficultés l’enfant rencontre-t-il pour exprimer linguistiquement la temporalité ?
Il est nécessaire, au niveau cognitif, que l’enfant soit capable de découper des périodes à l’intérieur de l’objet continu “temps” pour que les marques linguistiques de temporalité prennent un sens pour lui. Réciproquement, l’apprentissage du lexique temporel va permettre à l’enfant d’ins...
