Depuis la fin des années cinquante, la radio française a eu à cœur d’adapter certaines histoires de Tintin par exemple (voir le site de l’INA), et de grands éditeurs tels que Gallimard ou Frémeaux et Associés ont fait un travail d’envergure pour proposer des adaptations sonores de livres pour la jeunesse. Dans le cas de Gallimard, il s’agit de lectures de romans (Michel Tournier, Michael Morpurgo, Roald Dahl, etc.) ; chez Frémeaux, on s’attache à la mise en sons ambitieuse de textes tels que Le Tour du Monde en 80 jours, Les Misérables, et bien d’autres appartenant au patrimoine littéraire. Il n’est donc pas très exact de dire, comme le font les créateurs des Trois Petits Points, que le concept allemand de Hörspiel, ou pièce radiophonique, est absent des productions que les éditeurs français mettent à la disposition des enfants.
Transformer Louisette la Taupe en une BD sonore est néanmoins une bonne idée, et nous en proposons l’exploitation pour les enfants du cycle 2, tandis qu’une fiction sonore mieux appropriée au cycle 3, l’histoire de Adam et Thomas de Aharon Appelfeld illustre les richesses du site de Radio-France consacré aux fictions sonores pour la jeunesse. Le CD et les téléchargements ont donné un nouvel élan aux fictions sonores, mais il semblerait que l’école et les bibliothèques négligent encore par trop les possibilités qu’elles offrent.
Dans la série de Bruno Heitz, les Trois Petits Points ont choisi Rapidissimo et Sardine Express. Pour incarner le personnage de Louisette, ils ont fait appel à la voix si particulière de Yolande Moreau, qu’anime un soupçon de nonchalance et de fausse indifférence. Yolande/Louisette se languit de son vieil ami Fernand le ragondin, parti en Camargue. L’histoire qui s’enchaîne est digne des mises en scène du favori de la Grande Catherine, Potemkine, qui cachait la misère des villages par une prospérité de carton-pâte. Comme Louisette est très myope, Fernand lui décrit une Camargue de rêve qui n’est autre que l’univers des égouts souterrains où il règne sur les rats. De même que le son supplée aux déficits de la vision dans le cas de Louisette, de même la fiction sonore ouvre les portes de l’exubérance imaginative dont sont privés nos enfants, esclaves des écrans saturés d’images standardisées. Sardine Express se moque gentiment des travers de l’art contemporain, sur le ton d’un roman d’aventures qui voit Louise...