"Le maître est l'enfant"
Comment est née l'idée de ce film ?
Alexandre Mourot : Le 25 mars 2010, je suis devenu père. Et j’ai été instantanément fasciné par cet être si frêle, si vulnérable et pourtant si prêt à accueillir inconditionnellement le monde ! Ce moment est aussi la naissance d’un sentiment d’amour nouveau, puissant et très particulier puisque s’y associe une considérable responsabilité. La tendresse naît comme une évidence, la complicité aussi, mais le souci de protéger tout en aidant à grandir est plus difficile. Ce fut une métamorphose pour moi.
J’ai filmé mes enfants depuis leur naissance et, sans connaître Maria Montessori, j’observais des phénomènes dont elle parle : la concentration, l’élan vital, l’enthousiasme, la paix, l’objectif d’un enfant... Dans ma vie de tous les jours, lorsque j’observais mes enfants, me mettant en retrait, je les laissais faire, évaluer les difficultés et les résoudre à leur rythme. Dans quelques situations, je me suis retrouvé en porte-à-faux avec des proches qui ne comprenaient pas ma manière de faire, et pouvaient même la trouver insensée ! C’est le point de départ que je donne au film, qui est celui aussi de ma rencontre avec la pédagogie Montessori, fruit de mes questionnements et de mes lectures à cette époque-là. Les écrits de Maria Montessori m’ont bouleversé et me paraissaient même incroyables : une trentaine d’enfants de 3 à 6 ans qui travaillent presque sans l’aide de l’éducateur ! Ma curiosité m’a conduit à visiter des classes, rencontrer des éducateurs et j’ai alors décidé d’en faire un film pour montrer le quotidien d’une classe Montessori.
Expliquez-nous le titre : "Le maître est l'enfant"
A.M : Maria Montessori, par l’observation rigoureuse des enfants, s’était aperçue qu’ils étaient guidés par un "maître intérieur" qui les poussent à grandir, apprendre, explorer le monde. Elle parlait d’autoéducation tellement la place de l’adulte dans le processus de développement de l’enfant lui semblait être minimale, en tout cas à reconsidérer. Son rôle, selon la grande pédagogue, doit se limiter à préparer un environnement répondant aux besoins de l’enfant et à lui présenter aux moments les plus opportuns, les activités répondant à ses besoins. Il s’agit d’accompagner l’enfant dans son élan naturel de construction psychique et physique. En se laissant donc guider par ce maître qu’est l’enfant.
Le titre du film a aussi un deuxième sens : on voit bien dans une classe multi-niveaux Montessori que les plus grands apprennent aux petits. Enfin, Maria Montessori considérait que l’avenir de l’humanité dépendait de l’attention qu’on portait aux enfants. Ce sont eux qui peuvent faire évoluer les adultes, faire progresser la société ver...