Osiris. Les mystères engloutis d’Égypte
Il existe une belle coïncidence entre la découverte toute récente par des archéologues suisses et grecs d’une cité engloutie datant du IIIe millénaire dans une baie du Péloponnèse, et la très belle exposition qui vient de s’ouvrir à l’Institut du Monde arabe (IMA) : les eaux de la Méditerranée continuent de révéler leurs trésors. Franck Goddio et son équipe, spécialistes de l’archéologie sous-marine, présentent cette nouvelle étape de leurs fouilles commencées en 1996, dans la baie d’Aboukir au nord-est d’Alexandrie. Certains se souviennent de l’exposition au Grand-Palais et de la fascination devant les pièces exposées à peine sorties de l’eau, telle la stèle monumentale de Ptolémée VIII. Une grande place était alors faite au travail des plongeurs par le biais des vidéos, révélatrices d’un monde du silence riche de la mémoire de cités disparues, Canope, Héracléion. Cette place est moins importante ici, et l’on comprend pourquoi : ce ne sont plus les ballets sous-marins, mais les objets inestimables que l’on vient voir, soit 250 pièces trouvées lors de ces fouilles, que complètent une quarantaine d’œuvres sorties du musée du Caire.
Outre son intérêt esthétique, cette exposition apporte des réponses importantes en termes historiques et archéologiques : alors que le professeur au Collège de France, Jean Yoyotte, émettait dans les années 1950 l’hypothèse que Thônis et Héracléion étaient une seule et même ville, Franck Goddio lui en fournit la preuve avec la stèle de granit noir parfaitement préservée que l’on voit dans la seconde partie de l’exposition, au premier étage. Une fois passé le prologue, l’atmosphère de la salle haute et sombre qui ouvre l’exposition (dont la scénographie est pensée pour immerger le visiteur au fond de la mer) est bien celle d’un impressionnant fond marin, d’où se détachent, lorsque l’œil s’accoutume à l’obscurité, quelques magnifiques œuvres : notamment un Sérapis de belle taille à côté d’un gracile Osiris en bois où des traces d’or demeurent, une délicate stèle d’Horus enfant du 2e siècle av. J.-C. tenant dans ses mains un cheval et un lion et, monumental colosse de plus de cinq mètres, le dieu Hâpy, qui souligne la préoccupation fondamentale de l’Égypte, de quoi le mythe d’Osiris répond, la fertilité des terres liées aux crues du Nil.
À l’étage, on ne saura dire quelle pièce est la plus émouvante, la plus chargée de ce mystère qui accompagne Osiris. Serait-ce la statue couchée d’Osiris aux faucons, où Isis, transformée en faucon, couvre délicatement le bas-ventre du dieu par le jeu merveilleux du ciseau du sculpteur ? Serait-ce la collection des objets cultuels, l’Osiris renaissant de Dendara qui sourit tel un Bouddha, l’Apis de basalte, impressionnant de force et de réalisme, ou la stat...