Pour une véritable mixité scolaire
L’origine du livre
NVB : Nous sommes tellement habitués, l'un comme l'autre, à entendre dire que l'éducation et les politiques éducatives sont le tonneau des Danaïdes, qu’il y a des sujets beaucoup trop compliqués pour qu'on commence à voir le bout d'une solution et que tout ça prend du temps, etc.
Or, sur le sujet de la mixité sociale, j’ai lancé des expérimentations en 2015, en tant que ministre, pour que dans plusieurs territoires, des solutions soient apportées à cette absence de mixité sociale et que l'on mélange les élèves. J’ai voulu faire évaluer scientifiquement ces expérimentations et les résultats de ces expérimentations ont été publiés au printemps 2023. Ces résultats extrêmement positifs, globalement passés inaperçus dans le débat public, ont provoqué le déclic du livre. Pour une fois qu'on a quelque chose de positif, il faut quand même le raconter. Sinon, comment le débat public peut-il évoluer sur le sujet ?
FD : On sait que depuis de de longues années, les écarts se creusent, qu'on a régulièrement des enquêtes des données, soit internationales, soit françaises, etc. Et il y a très souvent une sorte de fatalisme au fond disant c'est comme ça, on ne peut pas faire autrement. La société est ainsi faite. Politiquement, il n’est pas très facile de jouer l'égalité scolaire car ce n’est pas évident que chacun d'entre nous y tienne tant que ça pour ses propos enfants. Je trouve que ce livre est bien plus original qu'il en a l'air, non pas parce qu'il dit qu’il y a des inégalités et du séparatisme, mais parce qu'il dit qu'on peut faire quelque chose. Il crée un peu de perspective politique dans un univers qui se vit sans cesse comme étant dominé par la répétition du même et des tensions croissantes.
Une révolution pour la mixité
FD : Il s’agit d’une révolution dans le sens où les expérimentations sont contraires au grand esprit révolutionnaire qui nous anime souvent, disant qu’il faut tout changer. Nous savons bien que dans le monde de l'école, ceux qui disent faut tout changer en général concluent que rien ne peut être fait. Ce qui est vraiment révolutionnaire est que l’on peut changer quelque chose.
NVB : En 2015, je constate, en tant que ministre de l’Éducation nationale, l'absence de mixité sociale. Ce qui a été testé jusqu'à présent n'a pas marché, puisque cela a toujours été une mesure uniforme partant du sommet de l'état, qui doit s'appliquer partout, de la même façon. Soit on joue sur le levier de la carte scolaire pour l'assouplir, une thèse plutôt défendue à droite, soit pour la rigidifier, une thèse venant de la gauche. Sauf que, en vérité, les deux pratiques emprisonnent les destins.