Après avoir quitté Rio, un avion survole l’immensité amazonienne. À son bord, un sapajou capucin en cage. Le pilote sort indemne de l’accident provoqué par un orage, négligeant le capucin qui se retrouve seul. Un couple de coatis à l’affût de nourriture le libère de sa cage. Quittant la carlingue, il va vivre une "aventure", ou plutôt une quête pour la survie dans un milieu qu’il n’a jamais connu, où il rencontre ses congénères, et tant d’autres espèces, souvent hostiles. Si le héros du film est bien le petit singe Saï souvent menacé, celui par les yeux duquel nous percevons ce monde lointain, le fleuve puissant, ses chutes, son cours tumultueux ou calme, serait le dieu qui préside aux destinées de tout ce qui dépend de lui dans cet espace extrême. Vu d’avion, le fleuve semble un ruban d’argent ou d’or selon la lumière, s’étalant à l’infini de la forêt pour rejoindre l’océan que l’on ne verra pas.
Les expériences du sapajou (toujours reconnaissable grâce à son collier rouge, symbole de sa captivité ancienne) varient au gré du jour, de la nuit, de la pluie, de l’abondance de nourriture et des fuites nécessaires pour éviter les prédateurs. Quelques moments de suspense savamment dosés tiennent le spectateur en haleine. Dans l’un, voulant attraper une branche de nèfles qui flotte, le singe tombe dans le fleuve et disparaît dans l’écume d’une chute. Dans un autre, le singe n’a d’yeux que pour ses fruits alors qu’un jaguar en quête de nourriture le guette. Dans tous les cas, l’apparition du petit singe constitue un exemple éclairant de ce qu’est le montage : le singe est tour à tour étonné, inquiet, content, il exprime les diverses émotions que le spectateur peut lui prêter, non parce qu’il serait un acteur exceptionnel, mais parce que le montage le rend expressif. L’"aventure"du petit singe se termine un peu comme dans les contes de fées, le sort des espaces amazoniens demeure en attente de décisions politiques.
Amazonia, Thierry Ragobert, musique Bruno Coulais, Francetv Distribution, 2014, 75 mns, 14,99 €.