Le concept de patrimoine, les mots pour le dire
Si l’on se réfère au droit romain, le patrimoine est le bien transmis par nos pères. Il constitue notre richesse, et nous avons l’obligation morale de l’entretenir et de l’augmenter avant de le transmettre à notre tour. Évidemment, un patrimoine, ça se dilapide aussi, mais nous engageons alors notre responsabilité face aux héritiers potentiels. Nous sommes les garants de notre patrimoine.
Bien national et beauté de notre culture
Le terme a été progressivement appliqué aux biens dont dispose une société et elle a, comme une personne physique, l’obligation morale de les entretenir, de les mettre en valeur et de les transmettre. La métaphore du juriste prend alors tout son sens : nous pouvons être de bons gestionnaires du patrimoine national ou, au contraire, dilapider une fortune par ignorance ou paresse. Quand il s’agit de patrimoine bâti, ou d’étendues “naturelles” cela prend un sens très matériel, très concret. La question se complique dans la mesure où le terme de patrimoine recouvre aujourd’hui un champ d’actions très vaste : tout ce qui nous vient du passé peut être patrimoine, si nous lui accordons de la valeur. Qui plus est, l’UNESCO a ajouté sur la liste du patrimoine mondial, tout ce qui relève du patrimoine immatériel : tout est patrimoine, tout est à prendre en compte. En France, cette évolution s’est faite en un siècle, à peu près. À la suite des travaux des grands architectes (Viollet-le-Duc) ou de grands fonctionnaires (Mérimée), la richesse archéologique française, étendue de l’Antiquité au Moyen Âge et à la création du Musée des monuments français et à la couverture juridique de ces monuments à travers la loi de 1913. Cette date est essentielle : était patrimoine national ce qui était inscrit sur la liste des monuments français, que des commissions créées ad hoc se chargeaient de compléter régulièrement. L’idée était de dresser la liste des sites les plus marquants, par leur beauté, leur place dans l’histoire de l’art ou dans l’histoire tout court. Ils devaient contribuer à fixer dans la mémoire des jeunes Français les beautés de notre culture que le monde nous envie. Au début du XXe siècle, histoire, histoire des arts et éducation civique étaient intimement liées pour la plus grande gloire de la France. En outre, cette position a été relayée par un nouveau médium : le cinéma. Né en France, exporté à un moment où la culture française est une culture internationale, le cinéma s’est chargé de diffuser dans le monde entier les images de Paris, des châteaux de la Loire, de la côte d’Azur, etc.
Une remise en cause de la notion
Les conflits mondiaux, les ouvertures sur d’autres mondes et la relativisation des hiérarchies culturelles qui s’en est suivie, ont porté des cou...